Santé

Peut-on vaper dans l’espace ?

Peut-on vaper dans l'espace ?

L’exploration spatiale fascine en repoussant les frontières de l’expérience humaine. Pourtant, elle soulève des questions inattendues sur l’adaptation de nos habitudes terrestres à un environnement aussi extrême. Parmi elles, une interrogation émerge à la croisée de la technologie et du quotidien : peut-on utiliser une cigarette électronique au-delà de l’atmosphère terrestre ? La réponse est loin d’être simple et dépend drastiquement du contexte. Si l’idée peut sembler triviale, elle engage en réalité des principes fondamentaux de sécurité, de physique et de réglementation qui régissent la vie en orbite. Dans un espace clos comme une navette, la question est d’abord réglementaire, tandis qu’à l’extérieur, elle devient une impossibilité physique.

Vapoter dans une navette spatiale : est-ce autorisé ?

L’idée de vapoter à bord d’un véhicule spatial, un environnement hermétiquement clos où chaque particule d’air est précieuse, se heurte immédiatement à des protocoles de sécurité extrêmement stricts. Les agences spatiales appliquent une politique de tolérance zéro pour tout ce qui pourrait compromettre la mission ou la santé de l’équipage.

La question de la sécurité à bord

Le principal obstacle est le risque d’incendie. Les cigarettes électroniques sont alimentées par des batteries lithium-ion, connues pour leur potentiel de surchauffe et de combustion spontanée. Dans l’environnement confiné et riche en équipements électroniques d’une station spatiale, un tel événement serait catastrophique. Les systèmes de support de vie sont conçus pour gérer des atmosphères contrôlées, pas pour faire face à un incendie d’origine électrique qui pourrait libérer des fumées toxiques et endommager des circuits critiques.

Qualité de l’air et contamination

La qualité de l’air est une autre préoccupation majeure. L’air à bord est recyclé en permanence par des systèmes de filtration sophistiqués. L’introduction de la vapeur d’une cigarette électronique, composée de propylène glycol, de glycérine végétale et d’arômes, poserait plusieurs problèmes :

  • La condensation de ces substances sur les équipements électroniques sensibles pourrait provoquer des courts-circuits ou des pannes.
  • Les filtres du système de support de vie ne sont pas conçus pour traiter ce type de composés chimiques, ce qui pourrait les encrasser ou les endommager.
  • L’impact sur la santé des autres membres de l’équipage, contraints de respirer cet air contaminé en microgravité, est inconnu et représente un risque inacceptable.

Réglementations internes des agences spatiales

En pratique, toutes les agences spatiales interdisent le tabac et, par extension, le vapotage. Les objets personnels emportés par les astronautes sont soumis à une sélection rigoureuse. Un dispositif présentant des risques liés à sa batterie, son fluide et son élément chauffant serait immédiatement refusé. La politique est similaire à celle des compagnies aériennes, mais avec des enjeux infiniment plus élevés, car une évacuation d’urgence est impossible.

Si la vie à l’intérieur de la station spatiale impose des contraintes réglementaires drastiques, s’aventurer à l’extérieur pour une sortie extravéhiculaire transforme cette interdiction en une impossibilité technique et physique.

Les contraintes techniques de vapotage en sortie extravéhiculaire

Une sortie extravéhiculaire, ou EVA, plonge l’astronaute dans le vide spatial, protégé uniquement par sa combinaison. Cet équipement, véritable vaisseau spatial individuel, n’est absolument pas conçu pour accommoder une activité comme le vapotage, qui deviendrait non seulement impossible mais aussi extrêmement dangereuse.

Le casque : une bulle de survie hermétique

Le casque d’un astronaute n’est pas un simple hublot. Il maintient une atmosphère contrôlée, généralement composée d’oxygène pur à une pression réduite pour faciliter la mobilité de la combinaison. Il n’existe aucun mécanisme pour y introduire un objet extérieur ou pour y évacuer de la vapeur. Toute brèche dans son étanchéité serait fatale. Tenter d’utiliser une cigarette électronique à l’intérieur de ce volume restreint est donc physiquement irréalisable.

Incompatibilité avec la combinaison spatiale

La combinaison spatiale est un outil complexe et encombrant. Les gants pressurisés, bien que permettant une certaine dextérité pour manipuler des outils, ne sont pas faits pour manœuvrer de petits objets comme une cigarette électronique. De plus, il n’y a aucun endroit pour la ranger. Plus grave encore, l’électronique de l’appareil pourrait potentiellement créer des interférences avec les systèmes de communication ou de surveillance de la combinaison.

Le problème de l’oxygène pur

Le point le plus critique reste la composition de l’atmosphère à l’intérieur de la combinaison. Dans un environnement à 100 % d’oxygène, le moindre élément chauffant, comme la résistance d’une cigarette électronique, représente un danger d’incendie extrême. La chaleur de la résistance pourrait instantanément enflammer des matériaux ou provoquer une réaction violente avec l’oxygène pur, avec des conséquences dramatiques pour l’astronaute.

L’incompatibilité technique avec l’équipement de sortie extravéhiculaire rend donc le vapotage impossible. Mais que se passerait-il si l’on poussait l’hypothèse à son paroxysme, en imaginant une personne dans l’espace sans aucune protection ?

Pourquoi vapoter sans combinaison dans l’espace est impensable

L’exposition directe au vide spatial est un scénario de science-fiction qui se termine invariablement par une mort quasi instantanée. Dans ce contexte, l’idée même de vapoter devient absurde, car les lois de la physique s’y opposent de manière fondamentale et brutale.

Le vide spatial et ses effets immédiats sur le corps

Sans la pression d’une atmosphère, le corps humain subit des traumatismes immédiats. Le manque d’oxygène provoque une perte de conscience en une quinzaine de secondes. Simultanément, le phénomène d’ébullisme se produit : les liquides corporels, comme la salive et les fluides des tissus, se mettent à bouillir en raison de la pression quasi nulle. La survie se compte en secondes, rendant toute action coordonnée impossible.

Phénomène Temps approximatif d’apparition Conséquence principale
Anoxie (manque d’oxygène) 10 à 15 secondes Perte de conscience
Ébullisme 10 à 15 secondes Vaporisation des fluides corporels
Exposition aux radiations Immédiate Dommages cellulaires massifs
Températures extrêmes Immédiate Brûlures ou gelures sévères

L’absence de milieu pour la vapeur

Même en ignorant la question de la survie, le processus de vapotage lui-même est impraticable. Sur Terre, la vapeur est un aérosol visible car les gouttelettes de liquide sont en suspension dans l’air. Dans le vide, il n’y a pas de molécules d’air pour former ce nuage. Le e-liquide, chauffé et expulsé, passerait instantanément de l’état liquide à l’état gazeux (sublimation ou ébullition instantanée) et ses molécules se disperseraient immédiatement, sans jamais former de nuage inhalable.

Les températures extrêmes

L’espace n’a pas de température propre, mais les objets y sont soumis à des conditions extrêmes. En plein soleil, la température peut dépasser 120 °C, tandis qu’à l’ombre, elle peut chuter à -150 °C. Une cigarette électronique cesserait de fonctionner instantanément, sa batterie gelant ou explosant, et son liquide se solidifiant ou se vaporisant de manière incontrôlée.

Les conditions spatiales ne sont pas seulement hostiles à la vie, elles modifient également le comportement de la matière et des technologies que nous utilisons sur Terre, ce qui a un impact direct sur le fonctionnement d’un appareil comme une cigarette électronique.

Impact des conditions spatiales sur l’utilisation des cigarettes électroniques

Au-delà de la simple présence ou absence d’atmosphère, deux facteurs omniprésents en orbite, la microgravité et le vide, altéreraient radicalement le fonctionnement d’une cigarette électronique, la rendant peu fiable et dangereuse, même dans un environnement pressurisé.

Comportement des fluides en microgravité

En l’absence de gravité, le comportement des liquides est dominé par la tension de surface et la capillarité. Dans le réservoir d’une cigarette électronique, le e-liquide ne resterait pas sagement au fond. Il pourrait flotter en globules ou adhérer aux parois de manière imprévisible. L’alimentation de la mèche en coton, qui repose sur la gravité et la capillarité, deviendrait totalement aléatoire, provoquant soit une alimentation insuffisante (goût de brûlé), soit une inondation de la résistance. Une fuite pourrait libérer des gouttelettes de liquide flottant librement dans la cabine.

Le défi de la dissipation thermique

Sur Terre, la chaleur générée par la résistance et la batterie est principalement évacuée par convection : l’air chaud monte et est remplacé par de l’air plus frais. En microgravité, la convection est quasi inexistante. La chaleur s’accumule autour de l’appareil, qui ne peut se refroidir que par radiation, un processus beaucoup moins efficace. La conséquence serait une surchauffe rapide et dangereuse de la batterie et des composants électroniques, augmentant considérablement le risque de défaillance ou d’incendie.

Effets du vide sur les matériaux

Les matériaux d’une cigarette électronique standard ne sont pas conçus pour l’espace. Exposés au vide, même lors de variations de pression dans un sas, les plastiques et les joints pourraient subir un dégazage. Ce phénomène consiste en la libération de composés volatils piégés dans la matière, ce qui pourrait contaminer l’environnement et fragiliser la structure de l’appareil. La différence de pression pourrait également faire gonfler ou même rompre la batterie.

Ces défis techniques et physiques sont si fondamentaux qu’ils sont intégrés au cœur des réglementations qui encadrent chaque aspect de la vie et du travail dans l’espace.

Les réglementations spatiales et leurs implications sur le vapotage

L’environnement spatial est le domaine le plus réglementé qui soit. Chaque gramme de matériel, chaque procédure et chaque activité sont régis par des protocoles dont l’unique but est d’assurer la survie de l’équipage et le succès de la mission. Dans ce cadre, le vapotage n’a tout simplement pas sa place.

Les traités internationaux et la sécurité des astronautes

Bien que des textes comme le Traité de l’espace de 1967 ne mentionnent pas spécifiquement le vapotage, ils établissent des principes de responsabilité et de sécurité. Les agences spatiales sont tenues de prendre toutes les mesures nécessaires pour protéger la vie de leurs astronautes. Interdire tout objet ou activité non essentielle présentant un risque, même minime, est une application directe de ce principe.

Protocoles de charge utile et objets personnels

Chaque objet envoyé dans l’espace, qu’il s’agisse d’une expérience scientifique ou d’un effet personnel, est considéré comme une « charge utile ». Il doit passer une série de tests et de certifications pour s’assurer qu’il ne présente aucun danger : qu’il ne s’enflammera pas, ne dégagera pas de gaz toxiques et ne créera pas d’interférences. Une cigarette électronique, avec ses multiples points de risque, échouerait à toutes les étapes de cette qualification.

Le principe de précaution en milieu isolé

En orbite, l’isolement est total. Il n’y a ni hôpital, ni pompiers, ni possibilité de recevoir une aide extérieure rapide. Le principe de précaution est donc appliqué dans sa forme la plus stricte. Toute activité est évaluée selon une analyse bénéfice/risque. Pour le vapotage, le calcul est simple :

  • Bénéfice pour la mission : aucun.
  • Risques associés : incendie, contamination de l’air, panne d’équipement, problèmes de santé.

Face à un risque non nul pour un bénéfice inexistant, l’interdiction est la seule conclusion logique et responsable. La sécurité prime sur le confort personnel.

En définitive, que l’on aborde la question sous l’angle réglementaire, technique ou physique, la réponse demeure la même. À l’intérieur d’un vaisseau, vapoter est interdit en raison des risques inacceptables pour la sécurité et les systèmes de survie. Lors d’une sortie dans l’espace, la conception des combinaisons et le danger extrême lié à l’oxygène pur le rendent techniquement impossible. Et dans le vide spatial sans protection, la question ne se pose même pas, la survie n’étant qu’une affaire de secondes. L’environnement spatial, par ses contraintes absolues, relègue ainsi le vapotage au rang des activités purement terrestres.

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